C’est vers six mois qu’un bébé commence à babiller. Pour qu’un bébé puisse parler, il faut qu’on lui parle.
Au XIIIe siècle, Frédéric II de Sicile tenta une expérience pour découvrir quelle langue parleraient des nourrissons à qui on ne s’adresserait pas dans le langage local. Peut-être le latin ou le grec? Il ne le sut jamais car tous les petits , qui étaient pourtant bien soignés et nourris, moururent.
« Si on ne lui parle pas, dit le psycholinguiste Cabrejo Parra , il ne peut entrer dans la relation. Quand le bébé fait baba, on lui répond baba et c’est important pour l’estime de soi. Il existe alors dans la relation. »
Vers 18 mois, un enfant commence à s’exprimer mais il ne fera des phrases à peu près complètes que vers 2 ans. Lorsqu’un traumatisme (accident, guerre, mort d’un parent) survient avant l’âge de la parole, c’est beaucoup plus difficile pour l’enfant de s’en sortir, de devenir résilient. Ce sont alors des « paroles gelées », dit Boris Cyrulnik. Se taire, c’est s’isoler, dit-il (1) .
Pouvoir se dire, pouvoir raconter, trouver une oreille qui écoute afin de se sentir exister en tant que personne.
Mais aussi parler pour faire exister l’autre. ainsi la magnifique histoire récente de ces trois femmes londoniennes qui se dressent face aux deux tueurs. Elles feront oeuvre de parole : en les interpellant, elles leur font quitter leurs instincts sauvages et les remettent dans leur état humain. Ces assassins ne sont plus des choses, des mécaniques; par la grâce de la parole, ils redeviennent des personnes.
Aller à la vidéo 5 : l’écoute.
(1) Boris Cyrulnik, Sauve-toi, la vie t’appelle, p.138